La pédagogie au service de l’évolution de nos Accueils Collectifs et Éducatifs de Mineur·es

Quand je vois des parcours comme celui de Philippe Meirieu, invité par Hugo dans le podcast, je me sens toute, toute petite. Il a été instit’, à tous les niveaux : en classe unique au premier degré, en collège, en lycée général et professionnel, à l’université… sans parler de toutes ses responsabilités en tant que directeur et président de diverses institutions et associations. Plus la recherche, les livres, les colloques et cie.

Moi de mon côté, mon parcours est plus modeste. J’ai dirigé des colos et des ALSH. J’ai fait de la formation aussi. Mais je n’ai jamais écrit de livres ni fait de grandes études.

Est-ce que c’est grave ?

Ben, en fait, non.

Surprise !

Parce qu’un des éléments fondateurs que j’ai appris en découvrant l’éducation populaire, c’est que j’ai a minima une expérience personnelle à partager avec les autres. Et que, comme elle est unique, eh bien personne ne peut la partager à ma place. Comme le dit Meirieu dans son entretien, chaque personne a des savoirs personnels, issus notamment de son éducation familiale.

J’ai déjà évoqué ce thème dans mon dernier article sur la conférence gesticulée, du coup je vais essayer de parler d’autre chose, histoire de changer. Aujourd’hui je voudrais plutôt vous parler de la place des ACEM et de comment chaque personne qui les compose peut les faire évoluer.

Et si on rajoutait un “é” à “ACM” ?

Notre site existe depuis quelques semaines. Un des retours qui nous a été fait c’est de la surprise devant l’acronyme utilisé : non pas « ACM » mais « ACEM ». Eh bien moi je milite pour ce petit « é », qui veut dire « éducatif ». Parce qu’on a décidé de ne plus appeler les temps extrascolaires « garderie » (comme quand j’étais petite) mais « accueil périscolaire », alors je milite pour que ce ne soit pas juste du vent mais qu’on en fasse vraiment des espaces pédagogiques.

Je veux que les ACEM soient des lieux d’éducation, au même titre que l’école ou la famille. Un espace complémentaire aux deux autres, où l’enfant apprend, différemment justement. J’aimerai tellement qu’on reconnaisse ces espaces d’apprentissage ! Et, si je ne peux pas changer la société, je peux, en tant que directrice, permettre que les ACEM que je dirige le soient.

Comme le définit Philippe Meirieu, l’éducation est un processus qui existe dans toute société : c’est la transmission de savoirs et de savoirs faire. La pédagogie quant à elle représente la réflexion sur les méthodes de l’éducation. Si on considère les ACEM comme des espaces éducatifs, il importe donc de se pencher sur la pédagogie. Celle-ci est, pour moi, une réelle opportunité de prendre du recul sur mes pratiques et d’évoluer sans cesse. Et donc, par extension, de faire évoluer les ACEM que je dirige.

Quel est l’intérêt de la pédagogie dans l’animation ?

Ce qui est intéressant avec la pédagogie, c’est que c’est un aller-retour permanent entre le dire et le faire, entre la réflexion et la pratique. Et ce que dit Philippe Meirieu pour l’école fonctionne très bien comme exemple pour l’animation :

“On dit « il faut des élèves autonomes », oui mais l’autonomie c’est quoi ? Qu’est-ce que ça veut dire « être autonome », autonome à quel âge, sur quoi, dans quelles activités ? Comment on va aider un enfant à accéder à cette autonomie ?”

Comme je le dis souvent aux stagiaires BAFD que je forme : « avec vos équipes, définissez en premier lieu ce qui vous paraît évident, surtout les « gros mots », c’est-à-dire les mots très généralistes comme autonomie, respect, liberté etc. ». Parce que deux personnes ne mettent pas la même réalité derrière ces mots, il me paraît primordial de les définir collectivement. C’est un des éléments qui aide à ce que le terrain soit cohérent avec le discours de départ, mais aussi à ce que toute l’équipe au complet aille dans la même direction. Et même en tant qu’animateur ou animatrice, il est possible d’impulser des propositions, ne serait-ce que dans les activités proposées et la manière de les faire.

“Qu’est-ce que j’ai découvert en enseignant ? Eh bien j’ai découvert que les choses n’étaient pas aussi simples que ça, qu’il y avait des élèves qui résistait à mon enseignement, qui ne voulaient pas apprendre au moment où je voulais, qui ne comprenaient pas ce que je prétendais leur expliquer. Et je me suis mis à chercher comment améliorer ma pratique […] j’ai cherché dans l’histoire de le pédagogie des outils pour améliorer ma pratique : cela m’a amené à rebondir vers d’autres théories.” Philippe Meirieu

C’est justement là que les pédagogues sont d’un grand secours. Parce qu’on peut être marqué·e par la sensibilité d’un·e pédagogue, ce qui va nous faire avancer. Les personnes qui ont pris le temps d’analyser et d’écrire sur la pédagogie sont sources d’inspiration. Et en plus, quand on commence, on se rend compte qu’il y en a plein, c’est-à-dire une infinité d’idées à aller explorer et tester. Pour ça, il existe différents moyens : les livres, bien sûr, mais aussi d’autres supports, comme les fameuses vidéos « l’éducation en question ».

Un exemple concret pour illustrer mon propos

Pour moi qui aime faire des activités manuelles, et qui aime mettre du sens dans ce que je fais, découvrir ses idées m’a permis de proposer de nouveaux ateliers. Des espaces de créations précédés et suivis de temps d’échange et de réflexions. En colo notamment, cela a donné une nouvelle dimension à ce qui je propose en début de séjour, quand les enfants ne se connaissent pas. Car non seulement nous faisons de la déco pour le centre (une forme d’appropriation de l’espace), mais en plus cela a permis aux enfants de cet atelier de se rencontrer autrement.

En effet, nous avons échangé sur des sujets comme « c’est quoi les vacances pour moi » ou « qu’est-ce qui me rend heureux ou heureuse ». J’ai le sentiment que ces ateliers ont donné une dynamique plus profonde à ce que je faisais, sans parler de l’intérêt de discuter de sujet comme ceux-ci avec des enfants avec qui j’allais passer quinze jours non-stop (et à qui j’avais envie de faire passer de bonnes vacances).

Alors, bien sûr, l’idée n’est pas d’essayer de refaire à l’identique. Pour le coup, ça n’a pas de sens. La clé de la réussite, c’est l’adaptation : à son public, à son territoire, à son contexte et aussi à son époque !

“Ce qui me paraît le plus important, ce n’est pas d’imiter ces exemples, c’est de s’inspirer de la démarche. Il ne s’agit pas de reproduire à l’identique ce que tel pédagogue à mis en place ou suggéré, […] il s’agit de se dire ils ont fait ça parce qu’ils avaient conscience d’un problème, eh bien inspirons-nous de cette démarche non pas pour reproduire ce qu’ils ont fait mais pour nous demander nous ce que nous pourrions faire.” Philippe Meirieu

Mettre en place des mécanismes de prise de recul pour le bénéfice de son ACEM

Comme le dit Philippe Meirieu, un éducateur ou une éducatrice, c’est quelqu’un qui prend des décisions et qui doit les prendre en connaissance de cause. Les ACEM étant entendu ici comme des espaces éducatifs, je considère donc les équipes pédagogiques comme étant des éducateurs et éducatrices du public accueilli. J’ai donc, dès que je suis dans ce rôle, un impact sur ceux et celles qui sont avec moi.

Bon ok, vu comme ça, ça peut faire un peu peur. Mais je crois vraiment que j’ai ce pouvoir. Et, histoire d’être un peu plus légère dans mes citations :

“Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités” Benjamin Parker, SPIDER-MAN

En conséquence je dois vraiment réfléchir ce que je mets en place (quel que soit mon niveau de responsabilités), sinon je vais n’être que l’outil de reproduction d’un schéma avec lequel, peut-être, je ne suis pas complètement d’accord si j’y réfléchis.

Pour finir, je vous rappellerai simplement que vous n’êtes pas seul·es dans cette démarche : vous êtes entouré·es par une équipe, qui peut vous aider à prendre du recul (oui, oui, messieurs les directeurs et mesdames les directrices, les anims ça aide à s’évaluer, si on leur laisse l’espace pour faire des retours… c’est même très souvent constructif).

Et il y a sûrement un organisme de formation pas trop loin de chez vous : l’occasion rêvé. Bien sûr, vous pouvez faire de la formation, espace idéal pour prendre du recul sur ses pratiques. Mais aussi, dans ces associations, il y a des groupes ou des espaces de discussion existants. Échanger avec d’autres personnes qui ont les mêmes fonctions que moi m’a vraiment permis de m’améliorer.

Sans parler de toutes les ressources qui existent aujourd’hui en ligne, avec cet intérêt de pouvoir encore plus largement croiser des pratiques différentes. N’oubliez pas, vous n’êtes pas seul·es dans le bateau (sinon, il coule, c’est sûr).

Si jamais vous avez envie d’un article sur un sujet particulier, n’hésitez pas à m’envoyer un p’tit mail via le formulaire de contact, je sera ravie de vous dire si je suis en capacité d’écrire dessus (ou peut-être pas, je ne connais pas tout non plus ^^)

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